Une nouvelle voie de synthèse de nanomatériaux hybrides vient d’être découverte : une méthode où les deux composants, nanoparticules métalliques de platine et polymères peptidiques, s’auto-assemblent spontanément comme deux briques de construction de même importance. Ce travail collaboratif mené par des chercheurs du Laboratoire de physique et chimie des nano-objets (CNRS/INSA/Université de Toulouse) et du Laboratoire de chimie des polymères organiques (CNRS/INP/Université de Bordeaux) est paru dans Nature Communications. Ces travaux, qui ont nécessité les expertises de cinq laboratoires(1) pour la caractérisation de ces superstructures, apportent la preuve expérimentale d’un concept nouveau d’interactions pour structurer des objets à l’échelle du nanomètre.
Les nanomatériaux hybrides (organique-inorganique) connaissent un intérêt croissant avec le développement de nouvelles méthodes de synthèse et la finesse des outils d’analyse de résolutions spatiales. Classiquement, ces nanocomposites sont fabriqués à partir d’une matrice organique pré-assemblée sur laquelle viennent se positionner des nanoparticules métalliques. Cette approche, souvent facile à mettre en œuvre, peut manquer de précision. Palliant cette limite du contrôle de la nanostructuration, de récents travaux pilotés conjointement par le Laboratoire de physique et chimie des nano-objets (CNRS/INSA/Université de Toulouse) et le Laboratoire de chimie des polymères organiques (CNRS/INP/Université de Bordeaux) viennent de décrire une approche radicalement différente où les deux nano-composants organique et inorganique se structurent mutuellement par auto-assemblage spontané.
Pour ces travaux, les chercheurs ont associé des briques nanométriques élémentaires étudiées dans leurs laboratoires respectifs : des nanoparticules de platine ultra-petites (d’un diamètre compris entre 1 et 2 nm en comparaison des 20 à 50 nm habituels) et des polymères peptidiques bioinspirés. En adaptant les points d’ancrages chimiques entre les polymères et la surface des nanoparticules, ils ont pu guider l’auto-assemblage des nano-objets et structurer la matière à l’échelle nanométrique. Il a été observé que certaines nano-hélices du polymère peptidique se déploient pour se lier avec les nanoparticules de platine et former une chaîne, sorte de colonne vertébrale autour de laquelle les hélices peptidiques restantes s’alignent ensuite spontanément, de manière régulière. La superstructure lamellaire ainsi obtenue, extrêmement bien organisée, combine les propriétés physiques de chaque brique de construction. Et les chercheurs, en modulant la nature des polymères, sont parvenus à contrôler l’espace entre les lamelles, une modification structurale clé qui permet de modifier les propriétés électriques de ces nanocomposites.
Ces travaux montrent que la maîtrise fine de l’interaction entre nano-composants organique et inorganique permet de créer des matériaux hybrides avancés combinant les propriétés de chaque brique prise de manière isolée. Ils ouvrent aussi un espace de recherche vers la découverte potentielle de matériaux aux propriétés encore insoupçonnées.
(1) Laboratoire de Chimie de Coordination (CNRS, Université de Toulouse) ; Instituto de Nanociencia de Aragón (Universidad de Zaragoza) ; Plateforme de Microscopie Électronique Intégrative, Centre de Biologie Intégrative (CNRS, Université de Toulouse) ; Laboratoire de Génie Chimique, Fédération Fermat (INP/CNRS/Université de Toulouse) ; Institut Carnot – Centre Inter-universitaire de Recherche et d’Ingénierie des Matériaux (INP/ENSIACET/CNRS/Université de Toulouse).
Référence :
Manai G., Houimel H., Rigoulet M., Gillet A., Fazzini P.F., Ibarra A., Balor S., Roblin P., Esvan J., Coppel Y., Chaudret B., Bonduelle C.,* Tricard S.,* Bidimensional lamellar assembly by coordination of peptidic homopolymers to platinum nanoparticles, Nat. Commun. 2020, 11, 2051 (Editors’ Highlight).