Article rédigé par Pierre Stoecklin, ancien directeur général des services de l’INSA Toulouse.

Né dans les années 70, le management de transition, traduction d’interim management, n’est apparu en France dans le secteur privé qu’à partir des années 2000. Notamment dans les grandes entreprises, et plus particulièrement dans le cadre d’une crise.

Le management de transition se caractérise par un délai court entre la définition du besoin par l’entreprise, le recrutement et la prise de fonction du manager en transition ; sa durée d’intervention est déterminée au départ et limitée dans le temps.

Ce type de management est prisé car les flux de travail sont de plus en plus tendus, la réactivité est un atout dans un monde concurrentiel, l’ouverture à des compétences extérieures que ne possède pas l’entreprise est un gage de réussite ! Par ailleurs, le fonctionnement en mode projet est de plus en plus apprécié et favorise ce type de recrutement.

Généralement, le qualificatif s’adresse à une fonction pour accompagner une entreprise ou un service dans une mutation importante, le manager de transition doit être en capacité de porter le changement qui souvent est impactant sur les personnes en amenant sa valeur ajoutée (humaine, financière, commerciale, technique, environnementale…). Ainsi, il est fait appel au manager de transition pour gérer des situations particulières et souvent difficiles.

Bien entendu, le bénéficiaire est recherché pour son expérience et son expertise managériales ainsi que pour ses compétences opérationnelles. Bref un haut potentiel est requis !

En fait, différentes situations de management et différents profils se cachent derrière ce mot « transition » : on retrouve des cadres, des chargés de projet, des chargés de mission, des experts juridique, financier, RH, logistique, immobilier, etc. Le management de transition ne se limite donc pas aux seuls postes de direction !

Mais pas de confusion avec le consultant externe qui est chargé d’apporter des conseils alors que le manager de transition est intégré dans l’organisation avec un rôle opérationnel ; c’est donc un dirigeant ou un cadre passant de l’analyse à l’action, et non un conseiller.

Pour répondre à ce type de sollicitation, le manager de transition doit posséder une panoplie d’atouts : disponibilité et efficacité, capacité à comprendre rapidement la situation locale, capacité à diagnostiquer les problèmes et à prendre des décisions y compris dans des situations de crise. Il doit en outre être pédagogue pour faire monter en compétence les équipes.

Bien sûr, le caractère temporaire de sa mission le dégage de tout enjeu « politique » au sein de l’organisation. Il est inutile de préciser que ce type de fonction est basé sur la confiance ; de fait une formalisation claire de ses fonctions dans le contrat de travail est indispensable tout comme une méthodologie de suivi de la mission afin de comptabiliser les avancées et les résultats.

Si le secteur privé a largement recours à cette pratique qui est en croissance rapide chaque année, contrairement à ce que l’on pourrait croire, le secteur public n’est pas exempt de ce type de dispositif !

En effet, les solutions d’externalisation existent depuis bien longtemps au niveau des états-majors ministériels qui recourent au fil de l’eau à des recrutements de conseillers spéciaux.

Plus encore, cette pratique répond à un très large nombre de problèmes rencontrés par les établissements publics. Souvent, en attendant une nomination, il est fait appel pour quelques mois par le ministère à un « faisant fonction » : c’est le cas pour les vacances de fonction des présidents ou des directeurs d’établissements publics ainsi que pour les agents comptables (avec un statut spécifique).

Les recrutements pour une mission nouvelle, pour répondre à un besoin en compétence ou pour le remplacement d’une personne en congé long, sont aussi fréquents. Bien souvent, ces intérimaires en CDD sont prolongés dans leurs missions en CDI, faute de compétences identiques des fonctionnaires titulaires. 

En forçant le trait, ne peut-on considérer le fonctionnaire sur emploi ou l’élu à une fonction de direction comme un manager de transition ?

Dans un environnement soumis à des évolutions constantes, le secteur public a de plus en plus besoin de compétences pointues alors que les concours, hormis quelques-uns, ne permettent que le recrutement d’agents « trop généralistes », mal adaptés aux besoins de terrain. Par ailleurs, et c’est un point de blocage, les rémunérations publiques ne sont pas du niveau des compétences recherchées !

Aujourd’hui pour le secteur public, foin du management de transition, l’enjeu est bien de mettre en place une véritable politique de réorganisation des métiers et de montée en compétence des fonctionnaires avec les conséquences financières idoines et les grades adaptés pour faire face à l’immense défi de l’intelligence artificielle. Alors tous concernés par la gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des parcours professionnels[1] !


[1]Les parcours professionnels : cette approche vise à mettre au premier rang la formation continue et l’employabilité des agents vers de futurs métiers et des fonctions nécessaires à l’établissement.