Retrouvez ci-après des éléments de réponse proposés par le comité de pilotage “rénovation du modèle social”, suite aux questions qui ont été posées lors du webinaire, à l’occasion d’échanges avec les étudiants ou sur l’adresse mail modèle social.
- Avez-vous des chiffres permettant d’objectiver ces idées reçues ?
Nous disposons d’indicateurs statistiques mais aussi d’enquêtes sociologiques et qualitatives qui ont démontré, depuis longtemps, que certaines visions, comme par exemple le fait que le faible coût des études est suffisant à assurer l’égalité en fonction de l’origine sociale, sont erronées. Certains éléments peuvent être soumis à l’épreuve des chiffres comme par exemple le fait que les indicateurs du Groupe INSA sont meilleurs ou non que ceux d’autres grandes écoles ou encore que les élèves de milieux sociaux défavorisés réussissent aussi bien que les élèves issus de milieux sociaux plus favorisés. D’autres idées reçues (critères de choix des études supérieures, effets de la réforme actuelle du lycée, efficacité des dispositifs nationaux tels les Cordées de la Réussite…) demandent des analyses qualitatives sur le long terme sur lesquelles travaillent de nombreux chercheurs, notamment issus des sciences de l’éducation.
De plus, certaines idées reçues ont une incidence plus politique, comme le fait qu’il n’est pas de la responsabilité ou de la capacité du Groupe INSA de lutter contre la reproduction sociale et les inégalités, alors même que la promesse d’ascension sociale fait partie de l’ADN même de nos écoles (a contrario de nombreuses autres écoles d’ingénieurs centrées quasi-exclusivement sur l’excellence scientifique). Ces idées reçues sont difficiles à objectiver dans la mesure où il s’agit de convictions qui conduisent, parfois, à l’inaction.
L’objectivation et la déconstruction des idées reçues nécessitent du temps ainsi qu’une analyse approfondie. Le livre blanc en sera une première étape, qui pourrait être complétée par des analyses ultérieures, appuyées par la constitution d’un Observatoire social du Groupe INSA.
- Pourquoi les PCS favorisées choisissent-elles l’INSA, au-delà de l’économie de coût a priori, puisque c’est une idée reçue ?
Les origines de la surreprésentation des PCS très favorisées, en hausse depuis une dizaine d’années au sein des INSA, sont évidemment multiples et se conjuguent entre elles :
- une efficacité et une équité des systèmes d’éducation primaire et secondaire français très moyennes et en baisse par rapport à d’autres pays, comme le démontrent les dernières enquêtes PISA (Programme International de Suivi des Acquis) de l’OCDE.
- des mécanismes d’autocensure, toujours aussi prégnants chez les élèves issus des classes moyennes et défavorisées, et pas forcément liés à leurs résultats et potentiel académiques mais plus globalement à leur environnement économique, social, culturel et géographique.
- un rayonnement national et une attractivité du Groupe INSA en hausse constante depuis 10 ans, entraînant une sélectivité accrue de par nos critères de recrutement actuels, essentiellement basés sur l’excellence académique.
- Pourquoi les PCS défavorisées ne choisissent-elles pas l’INSA ? Même avec un faible coût des droits d’inscription, puisque c’est une idée reçue ?
De nombreux éléments explicatifs, issus de la littérature académique, permettent de comprendre les choix différenciés des familles en fonction de l’origine sociale. Parmi ceux-ci, on trouve certes des critères économiques (coût des études au sens large) et géographiques (éloignement du domicile, peur de l’inconnu) mais également des difficultés liées aux représentations des études (image d’excellence de l’INSA, perçue comme inaccessible et provoquant de l’autocensure pour les élèves de milieux sociaux défavorisés, autocensure pouvant être renforcée par les parents voire parfois par les enseignants) mais aussi de la méconnaissance vis-à-vis des études supérieures et du système éducatif plus généralement. Ces inégalités risquent de se renforcer avec la réforme actuelle du lycée, dans la mesure où les élèves et leurs familles n’ont pas nécessairement connaissance des choix de spécialité à opérer pour réussir à entrer dans telle ou telle filière de l’enseignement supérieur. Le livre blanc intégrera une analyse plus détaillée de ces freins et de ces phénomènes d’autocensure conduisant à la construction des inégalités de parcours scolaire et générant de nombreuses et lourdes conséquences sur l’accès et la réussite dans les études supérieures.
- L’analyse basée sur les PCS et les boursiers est-elle pertinente et ne devrait-elle pas se baser sur davantage d’indicateurs ?
Les PCS des parents ainsi que le statut de boursier (de lycée et CROUS) des élèves inscrits dans les INSA sont les seules données à caractère social connues des établissements. Aucune donnée à caractère économique n’est connue à l’heure d’aujourd’hui (revenus, pouvoir d’achat, niveau de vie, enfants à charge…) sauf à lancer une enquête. Si vous avez des suggestions à faire, n’hésitez pas à envoyer un mail à modelesocial@groupe-insa.fr.
- Dans la forme actuelle du recrutement postbac pour le cursus ingénieur avec un bac général, la personnalité des candidats ne peut être qu’un bonus à leur dossier et non un frein ?
Oui, un candidat « bac général » peut obtenir un bonus de points via l’entretien, il n’y a pas de malus.
- L’aspect reproductif des insa*iens a-t-il été évalué dans des études ?
Nous n’avons pas à notre disposition les données sur les parents qui permettraient de quantifier ce caractère endogène des élèves INSA. Ce phénomène de formation de couples INSA a certainement toujours existé mais, en 1957, il y avait beaucoup moins de filles que maintenant donc davantage de couples peuvent se former. Nous n’avons pas non plus d’éléments pour comparer l’INSA à d’autres écoles qui ne rencontreraient pas, non plus, un déséquilibre majeur entre nombre de filles et de garçons.
En revanche, nous avions réalisé une enquête au niveau du Groupe en 2019 avec une question sur le diplôme des parents. Environ 16 % des élèves français avaient répondu que l’un de leurs parents avaient un diplôme d’ingénieur, et pas forcément INSA.
La thèse de Marion Erouart financée par l’IGB « Analyses psychosociales des processus d’orientation genrés vers et pendant la formation d’ingénieur·e·s », soutenue en décembre 2020 a montré que, sur les promotions de 1re année entrées à l’INSA Lyon en 2017 et 2018 (environ 1 200 répondants), 60 % avaient un modèle ingénieur dans leur entourage proche, 50 % connaissaient un·e élève déjà scolarisé·e à l’INSA, 44 % connaissaient un·e diplômé·e INSA. https://institut-gaston-berger.insa-lyon.fr/sites/institut-gaston-berger.insa-lyon.fr/files/doctorat_marionpdf.pdf
- Y a-t-il des aspects de la vision de GASTON BERGER que l’Institut GASTON BERGER rejette et si oui, lesquels ?
Nous ne connaissons Gaston Berger qu’à travers ses écrits, ses discours et les travaux des chercheurs qui ont travaillé sur sa vie et son œuvre. Pour répondre à votre question, vous pouvez contacter Marie-Pierre Escudié, chargée de recherches et d’enseignement au sein de l’IGB et consulter sa thèse : « Gaston Berger, les sciences humaines et les sciences de l’ingénieur, un projet de réforme de la société » (2013) https://institut-gaston-berger.insa-lyon.fr/fr/content/publications-et-valorisation
- Des mesures ont-elles été prises ces dernières années pour favoriser le modèle social du Groupe INSA ?
Des actions dans les lycées et collèges ciblés (en réseau d’éducation prioritaire (REP), dans des quartiers classés Politique de la Ville (QPV), en zones rurales ou dans des villes dites isolées) ont été conduites par tous les INSA notamment dans le cadre du dispositif national des cordées de la réussite. Des dispositifs d’aides financières à caractère social ont également été mis en place, financés majoritairement par des fonds de mécénat récoltés par les Fondations, essentiellement à Toulouse et à Lyon, et par la Fondation Groupe INSA depuis 2 ans. Néanmoins les enveloppes financières dégagées pour ces aides restent relativement faibles au regard du nombre d’étudiants dans les INSA.