Institutionnel

Une enquête sur les « Conditions de travail, risques psychosociaux» pilotée par Marilyne Bèque et Amélie Mauroux à l’initiative de la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) du ministère du Travail montre des évolutions plutôt positives entre 2013 et 2016.

Les améliorations
Les situations de violence morale, bien que demeurant encore très fréquentes, sont en recul. En 2016, 30 % des salariés, contre 37 % trois ans auparavant, disent avoir subi au cours des douze derniers mois un comportement hostile dans leur travail (être la cible de propos blessants, être ridiculisé en public ou ignoré, voir son travail injustement critiqué ou saboté, devoir effectuer des tâches inutiles ou dégradantes, subir des propositions à caractère sexuel, etc.).

Le sentiment de reconnaissance s’améliore. Parmi les salariés, 24 %, soit un taux en baisse de 5 points, estiment que leur travail n’est pas reconnu à sa juste valeur.

Le recul de la charge mentale s’observe pour toutes les catégories de salariés, mais elle reste plus élevée pour les cadres (57 % doivent penser à trop de choses à la fois) et pour les femmes (47 %, contre 40 % des hommes).

En 2016 comme en 2013, 80 % des salariés disent pouvoir compter sur l’aide de leurs collègues en cas de travail délicat et 90 % indiquent avoir la possibilité de coopérer pour effectuer correctement leur travail. Les données relatives aux tensions dans les rapports avec les collègues ou le supérieur hiérarchique se sont stabilisées

Le contact avec le public, qui concerne trois salariés sur quatre, engendre souvent de l’intensité émotionnelle, la proportion de salariés disant vivre des tensions avec le public demeure quasi stable.

De même, comme en 2013, 10 % des salariés estiment devoir toujours ou souvent faire des choses qu’ils désapprouvent

Les points de vigilance
Le travail dans l’urgence augmente toujours (+ 1 point), mais seulement pour les femmes, qui sont 68 % (+ 3 points) à devoir fréquemment abandonner une tâche pour une autre plus urgente.

En 2016 comme en 2013, 35 % des salariés subissent des contraintes, allant du contrôle permanent exercé par la hiérarchie, en passant par la demande extérieure (public) obligeant à une réponse immédiate.

L’autonomie se réduit, surtout pour les catégories les moins qualifiées. Le travail est de plus en plus normé. Ainsi, 48 % des salariés (+ 2 points par rapport à 2013) sont soumis à des normes de production à satisfaire en une journée et 46 % (+ 3 points) doivent suivre des procédures précises. Les salariés sont de moins en moins nombreux à choisir eux-mêmes la façon d’atteindre les objectifs définis et à ne pas avoir de délais ou à pouvoir faire varier les délais fixés.

Parmi cinq contraintes physiques : rester longtemps debout, rester longtemps dans une posture pénible, effectuer des déplacements à pied longs ou fréquents, devoir porter ou déplacer des charges lourdes, subir des secousses ou des vibrations, en 2016, les expositions aux contraintes et les risques physiques demeurent inchangées pour toutes les catégories socioprofessionnelles, les ouvriers restant les plus exposés. Parmi les salariés, 34 % sont toujours soumis à au moins trois contraintes physiques ; 18 % souffrent d’un bruit intense qui les gêne pour entendre une personne située à 3 mètres. Enfin, 29 % des salariés (– 2 points) déclarent être en contact avec des produits dangereux. Cela concerne peu de cadres (13 %), mais 54 % des ouvriers non qualifiés (+ 3 points).

Les contraintes horaires sont stables, voire en légère amélioration. Les salariés sont un peu moins nombreux qu’en 2013 à ne pas disposer de 48 heures de repos par semaine, à ne pas connaître leurs horaires du mois à venir ou encore à ne pas pouvoir s’arranger avec leurs collègues.

Conclusion
Les changements organisationnels ont marqué le pas entre 2013 et 2016 : la part des salariés ayant connu au cours des douze derniers mois au moins un changement important de leur environnement de travail a reculé, passant de 43 % à 41 %. La moindre violence morale peut être mise en rapport avec cette pause relative dans les réorganisations, car les comportements hostiles sont fortement associés aux changements organisationnels. Mais l’ampleur du recul (– 7 points) porte à croire qu’il ne peut s’agir de la seule cause. On peut penser que la mobilisation de l’opinion publique, des pouvoirs publics et des partenaires sociaux sur les thèmes des RPS et du harcèlement moral – avec notamment le troisième plan santé au travail lancé en 2015 et l’accord national interprofessionnel sur la qualité de vie au travail ratifié en 2013 – ont contribué à cette accalmie, même si les tendances à l’intensification et à la standardisation du travail n’ont pas encore été inversées.

Cela pourrait s’expliquer également par une plus grande sensibilisation des encadrants aux risques psychosociaux (RPS), par des efforts de prévention et par les campagnes d’information générale. Les comportements hostiles sont en forte baisse dans le commerce et les transports, dans le secteur des activités scientifiques ainsi que dans l’administration publique.

Enfin, les auteures ne le mentionnent pas, mais il faut signaler les progrès faits dans l’utilisation des outils de mesure dans le cadre de la prévention des risques psychosociaux (RPS) ou dans le cadre de mise en place  de politique de qualité de vie au travail (QVT) : échelles d’évaluation de Robert Karasek du stress au travail ou de Johannes Siegrist ; un questionnaire inspiré par ces deux échelles est mis en place actuellement par notre CHSCT.